Une histoire, des rencontres
Pour comprendre l’histoire du Champagne Alfred Baulant, il faut raconter celle des Limongi, qui s’est faite de rencontres et d’unions.
Le récit de chacune de ces lignées est un véritable témoignage de leur époque, l’œuvre du temps et de la vie.
De Maratea à Reims
Issu d’une ancienne famille de nobles, originaire de la Basilicate dans le Sud de la botte italienne, Antonio Limongi quitte sa ville natale de Maratea et arrive en France en 1902.
Il part de son village niché au creux des montagnes, bercé de soleil, au bord de l’eau cristalline de la Mer Tyrrhénienne, pour rejoindre la Champagne, ses coteaux et sa mythique Cathédrale de Reims.
C’est pour cette dernière que le jeune transalpin devient artisan doreur-argenteur en charge de la restauration des candélabres, chandeliers, calices ainsi que pour toutes les pièces d’orfèvrerie de la Cathédrale.
La naissance d’une vocation familiale
Son fils, Joseph, né en 1898 à Maratea était destiné à suivre les traces de son père. Mais il entreprend finalement une autre voie : formé à Namur en Belgique, il embrasse la carrière de bijoutier.
Il revient à Épernay, s’installe, se marie et ouvre sa propre boutique en 1920, la première bijouterie de la famille Limongi. Également habile horloger, il transmettra à son unique fils sa vocation pour ses deux métiers.
Il impulse ainsi la très longue tradition d’un savoir-faire rare et noble, de l’artisanat d’art et de l’orfèvrerie.
Passés Composés
Pierre Limongi, fils de Joseph et petit-fils d’Antonio, naît en 1929 à Reims. Il est formé par son père à l’horlogerie, dans la pure méthode de la transmission orale et empirique et possède toutes les qualités pour ce métier : précision, patience, minutie, sens du détail et extrême rigueur.
Aux côtés de son père Joseph, il reprend la bijouterie pour laquelle il met au service ses talents d’horloger. Parmi ses clients se trouve une grande famille de la Champagne, qui réside au Château de Mareuil-sur-Aÿ : Mr et Mme René Chayoux. Pierre se rend chaque semaine dans leur demeure pour remonter ou réparer les nombreuses pendules et horloges du château.
Fils du baron Joseph Chayoux, René Chayoux est un personnage qui a marqué l’histoire de la Champagne. Après avoir repris l’affaire familiale dans le commerce du vin, il se porte acquéreur de la marque Alfred de Montebello qui comprend le Château de Mareuil-sur-Aÿ et une centaine d’hectares de vignes. Investisseur très estimé du monde champenois, il est l’un des grands artisans de la création du CIVC (Comité Interprofessionnel des Vins de Champagne), l’instance qui défend encore aujourd’hui l’appellation Champagne à travers le monde. À la fin des années 1950, avec sa femme Yvonne, étant à la recherche d’une dame de compagnie, ils accueillent naturellement une jeune orpheline, prénommée Baïa.
Baïa est née en Algérie en 1929, alors département Français. Ayant perdu ses parents à l’âge de quatre ans, c’est à 18 ans qu’elle est recueillie par le sous-préfet de Constantine en Algérie. Il rentre à Aix-en-Provence avec sa famille dans les années 1950, en emmenant Baïa alors âgée de 21 ans. Sur les recommandations d’une amie commune, le sous-préfet De Morand confie donc la jeune Baïa à Monsieur et Madame René Chayoux comme dame de compagnie.
N’ayant pas d’enfants, ils la considèrent très vite comme leur propre fille et veillent à son éducation. Passionnée par l’art culinaire depuis son plus jeune âge, ils inscrivent Baïa à des cours de cuisine dans la célèbre École du Cordon Bleu, à Paris. Elle y apprend la gastronomie et développe un réel talent qui la conduit à préparer des mets pour des invités très prestigieux, parmi lesquels la Reine-Mère d’Angleterre, Elisabeth I. Sa réputation de grande cuisinière la précède auprès du tout Épernay.
Quel est le lien entre ces trois histoires ? Pierre Limongi rencontre Baïa au Château de Mareuil, alors qu’il réparait les horloges, et en tombe amoureux. Ils se marient en 1958 et donnent naissance à un fils, Jean-Marie, en 1960. René et Yvonne Chayoux décèdent respectivement en 1969 et 1979. Ils lèguent à Baïa une petite partie de leur patrimoine, quelques hectares de vignes, en remerciement de ses nombreux services et pour son dévouement, mais aussi par affection pour elle. L’héritier du château, bras droit de M. Chayoux, confie même au couple la garde et l’entretien du château de Mareuil durant quelques années, et à Baia l’organisation de réceptions.
Le cœur à l’ouvrage
Horloger de formation, Jean-Marie Limongi rencontre Nelly Nyfeler à la prestigieuse École d’Horlogerie de Morteau, dans le Jura. Issue également d’une famille de bijoutiers et horlogers, elle devient sa femme en 1981. Dans la Haute-Marne natale de Nelly, le couple ouvre sa première bijouterie par ses propres moyens à l’âge de 22 ans seulement, à Joinville.
L’excellente gestion de leur commerce florissant se fait très vite remarquer et est récompensée par le prix Mercure d’Or. Distinction qui leur est décernée par le Ministre du Commerce en personne. Ils sont les plus jeunes commerçants à avoir reçu ce prix et les premiers bijoutiers à figurer au palmarès. Il ne fait aucun doute que les valeurs transmises par leurs deux familles y sont pour beaucoup.
Le couple donne naissance à trois enfants, Matthieu (1983), Thomas (1986) et Élise (1990). Alors que les époux souhaitent revenir s’installer dans le berceau sparnacien de la famille Limongi, l’opportunité se présente d’acheter la bijouterie leader de la ville : ils n’hésitent pas une seconde.
La bijouterie centenaire Alfred Baulant, créée en 1902 jouit d’une belle réputation dans la région. Elle est gérée par un descendant du fondateur. Il recherche un repreneur, en l’absence d’héritier, et estime que sa bijouterie avant-gardiste mérite les meilleurs gérants, capables de revendiquer les valeurs d’excellence et d’innovation que les Baulant ont toujours défendu.
Jean-Marie et Nelly sont les candidats parfaits à cette reprise qui a lieu en 2002. Avec la même rigueur que pour leur joaillerie de Joinville, ils s’attèlent alors à poursuivre le développement de la bijouterie Baulant, qui fêtera bientôt ses 120 ans d’existence.
Devenue une partie intégrante de leur histoire familiale, ils envisagent la bijouterie Alfred Baulant davantage comme un précieux héritage à perpétuer que comme une simple acquisition de commerce. Ils sont fiers aujourd’hui de défendre ce patrimoine avec les mêmes convictions que s’ils étaient les héritiers directs de la famille Baulant. Depuis près de 20 ans, ils sont une référence en matière de bijouterie et joaillerie dans la région et le nom Baulant, désormais, va de pair avec celui de Limongi. Leur fille Élise, passionnée et formée au métier également, s’est logiquement vu confier les rênes de la boutique d’Épernay, épaulée par ses parents.
Façonner l’avenir
Héritière de tous ces destins croisés, Élise réunit toutes les valeurs de cet alliage de lignées. Dans ses gênes, se mêlent le sens de l’esthétique et de la minutie des artisans d’art : l’humilité et l’abnégation d’une orpheline déterminée, le goût pour l’excellence et la rigueur d’une grande famille d’entrepreneurs champenois.
Elle a hérité des traits de caractère de ses parents et grands-parents, animée de ces mêmes valeurs motrices qui ont forgé le destin familial. À l’instar de chaque génération qui l’a précédé, Élise se lance dans son propre défi : vinifier pour la première fois la production issue des vignes héritées de sa grand-mère Baïa. Elle poursuit l’œuvre de sa famille tout en cultivant fièrement ce patrimoine.
Comme ses aînés, elle est une travailleuse acharnée pour qui la réussite ne peut passer que par la volonté de transformer chaque obstacle en opportunité. La famille enchaîne les défis en se donnant les moyens de la réussite, convaincue que « où il y a la volonté, il y a le chemin » ; le Champagne est le prochain. Le nom s’impose de lui-même : Champagne Alfred Baulant, comme un symbole de cette bijouterie qui fait la synthèse entre une histoire faite d’opportunités et ce savoir-faire noble et précieux de joaillier. En se donnant les moyens de réussir, les Limongi souhaitent ainsi appliquer à leurs cuvées ce qu’ils aiment dans leur métier : faire plaisir, provoquer l’émotionnel, et défendre l’art de « savoir faire beau ».
Ils investissent un nouveau lieu qui se veut le symbole de cette nouvelle page à écrire. Fidèle à son berceau sparnacien, le trio s’installe à Dizy. Le Champagne Alfred Baulant prend vie en plein cœur du village, dans l’une de ses plus anciennes maisons construite en 1790. Entre ses nouveaux murs, la famille ouvre les portes de son gîte pour renouer avec la tradition et le sens de l’accueil que Baïa a initié à quelques kilomètres de là…
Ainsi se poursuit le roman familial avec une nouvelle génération qui prend la suite de ses aînés. Animés par un sens aiguisé du challenge et de l’esthétisme, ils se lancent dans une aventure pour laquelle ils possèdent déjà toutes les qualités, et qui façonnera la suite de leur destin romanesque.